JE T'AIME, ASSASSIN...

 

 

 

 

Disclaimer : tout l'univers de Saint Seiya que tu reconnaîtras aisément appartient à Masami Kurumada. L'auteur ne retire aucun bénéfice si ce n'est le plaisir d'écrire et d'être lue.

Genre
: romance Yaoi/Lemon.

Rating
: interdit au moins de 18 ans.

Note
: Aïoros/Saga, Shura/Aïolia. ATTENTION ! Pour le premier couple, je mets les pieds dans le plat. Aïoros a l'âge auquel il a été tué par Shura, 14 ans. Merci à Hyma pour la bétalecture.

Auteur
: Scorpio-no-Caro

J'espère que tu aimeras. Bonne lecture...

 

 

Chapitre 1

Depuis quelques mois, depuis leur retour à tous, Aïoros et Aïolia passaient tout leur temps ensembles. Le Sagittaire ne connaissait plus ce petit frère qui était devenu le courageux et puissant Chevalier d'Or du Lion et Aïolia était encore bien jeune lorsqu'il avait été privé de son grand frère. Même si aujourd'hui, il avait toujours quatorze ans, sa maturité et sa sensibilité surprenantes pour quelqu'un de son âge, faisait de lui le conseiller et le confident de tous les Chevaliers, à commencer par le Lion, qui lui, le voyait toujours comme son grand frère. Et ce lien fraternel semblait se renforcer jour après jour.

Ce matin là, il faisait gris. Le ciel s'était chargé d'énormes nuages venant du sud et pleins comme des œufs d'une pluie qui promettait d'être torrentielle. Aïoros descendait vers le Temple du Lion et à mesure qu'il avançait, il percevait de mieux en mieux le cosmos de son frère. "Aussi sombre que le ciel !" songea-t-il en se demandant pourquoi le moral d'Aïolia faisait aussi grise mine que la météo. Il venait de traverser le Temple du Scorpion et il avait perçut la présence de Milo et Kanon qui s'éveillaient de façon plutôt tendre ou torride, au choix. Et maintenant qu'il passait celui de la Vierge, il sentit également le cosmos de Mû qui semblait en pleine extase. Il sourit. Ca lui plaisait de voir que bon nombre de Chevaliers s'étaient enfin ouvert à l'amour. Que se soit une véritable passion, comme pour Mû et Shaka ou une simple attirance physique comme pour le Scorpion et le cadet des Gémeaux, il était content pour eux. Ils pouvaient enfin vivre une vie sans soucis de Dieux, de Guerres Saintes ou d'un quelconque ennemi.

Lui-même était amoureux, mais il avait conscience que son jeune âge mettait son amour hors de sa portée. Tous ne le voyaient que comme leur jeune frère, mais il ne désespérait pas de se faire un jour aimer de Saga. Depuis leur arrivée au Sanctuaire, à lui et aux jumeaux, il avait été attiré par l'aîné. D'abord ce n'était que de l'amitié, puis les années passant, ce sentiment était devenu plus profond. Il avait vu Saga devenir un Chevalier exemplaire, d'une bonté et d'une gentillesse infinie. Son amour pour Athéna, sa loyauté et son dévouement étaient cités en exemple aux apprentis. Il semblait rayonner de l'intérieur et son éclat s'étendait à tous ceux qui l'entouraient. Seul son jumeau semblait insensible à son aura. Puis Saga disparut, ainsi que Kanon.

Et aujourd'hui, il retrouvait son ami d'enfance, son amour d'adolescence. Ses sentiments n'avaient pas changé, mais voilà. Il avait quatorze ans et Saga le double. Mais abandonner l'espoir n'a jamais été l'apanage des Chevaliers d'Athéna dans quelques domaines que se soit. Il se ferait aimer du Gémeaux, il s'en était fait la promesse.

Il entra dans le Temple du Lion et frappa à la porte de l'appartement. L'homme qui vint lui ouvrir avait une vague ressemblance avec son frère. De toute évidence il venait de se lever. Il n'avait rien du fier et royal Lion. Les cheveux en bataille, les yeux encore endormis, en caleçon et t-shirt, pieds nus, et une grimace sur le visage à faire pâlir d'effroi Kassa des Lyumnades.

- J'te réveille ?
- Tu sais bien que non. J'ai juste traîné au lit.
- Va te doucher, j'te prépare le p'tit-dej !

Sans chercher à étouffer le bâillement qui faillit lui décrocher la mâchoire, le faisant sur le coup ressembler à un Lion qui s'éveille de sa sieste, Aïolia se dirigea vers la salle de bain tout en se grattant vigoureusement la tête d'une main et l'entrejambe de l'autre. Depuis la cuisine, Aïoros entendit l'eau couler et se permit de sonder doucement le cosmos de son frère. Il était de plus en plus sombre. Il comprit que le malaise qui l'étreignait n'était pas passager. Il était profond et Aïolia ressentait de la colère vis-à-vis de ce mal être, comme s'il s'en voulait de ce qu'il éprouvait.

C'est l'estomac bien remplit que les deux frères se rendirent aux arènes pour l'entraînement quotidien avec tous leurs compagnons. Il ne manquait qu'Aphrodite, Shura, Milo et Kanon. Aldébaran proposa un combat à DeathMask, alors que Shaka affrontait Camus. Ils n'utilisaient pas leur cosmos ni leurs attaques. Il s'agissait de s'entraîner en se servant de la maîtrise qu'ils avaient en arts martiaux et même s'ils ne portaient pas leurs coups, il arrivait quand même qu'ils se touchent involontairement et ça pouvait faire très mal. Les quatre retardataires daignèrent enfin se montrer avec une demi-heure de retard et Saga défia immédiatement son frère.

- C'est pour me punir de mon retard ? plaisanta l'ex Marinas.
- Exactement ! rétorqua l'aîné en envoyant un coup de pied en ciseau dans la poitrine de son jumeau.

Kanon fit un vol plané en arrière et retomba lourdement sur les fesses.

- Hé ! Mais t'es malade ! s'écria-t-il en frottant son torse endolori ainsi que son fondement.
- Ce sera comme ça à chaque fois que tu seras en retard !

Et Saga enchaîna les coups de poing, les coups de pieds retournés, sautés et les balayages. Kanon eut du mal à suivre au départ puis contra son jumeau avec la même rapidité et la même détermination. Ils étaient splendides ! Milo proposa un combat au Sagittaire et mal lui en prit. Moins de dix minutes plus tard, le fier Scorpion demandait grâce.

A l'arrivée des quatre derniers Chevalier d'Or, Aïoros avait sentit le cosmos de son frère s'emballer d'abord puis se rétracter pour finir par se fermer complètement. Jeune mais pas idiot, le Sagittaire commença à se dire que l'un des quatre était la cause de l'état d'esprit du Lion. Mais lequel ? Tout en réfléchissant, il ne pouvait, de son coté, s'empêcher de regarder Saga. Il était redevenu le Chevalier de son adolescence mais l'âge lui conférait une assurance et un charisme qui bouleversait Aïoros au plus profond de son être. Lui, qui en était encore à ressentir ses premiers émois physiques, avait malgré tout conscience que le Gémeaux ne l'attirait pas que comme ça. Il aimait sa droiture, son sens de la justice, sa douceur, son intelligence, sa profonde gentillesse. Aïoros savait qu'il allait lui falloir déployer des trésors de patience pour que Saga commence à le voir différemment que comme l'adolescent qu'il était encore.

C'était pourtant de sa faute, à Saga. C'est de lui qu'émanait l'ordre de le tuer qu'avait reçu Shura. Sans ça, il aurait eu presque le même âge et il n'aurait pas eu à user de stratagèmes pour le séduire. Bon d'accord ! Ce n'était pas vraiment Saga qui avait donné cet ordre, mais qu'importe. Les faits étaient ce qu'ils étaient. Et il était bien décidé à conquérir son cœur.

Ils étaient presque arrivés au cinquième Temple quand la pluie se mit à tomber à torrent. L'orage était terrible. Le tonnerre grondait violemment presque en même temps que les éclairs zébraient le ciel, preuve que la tempête était au dessus du Sanctuaire. Les deux frères gravirent les dernières marches en courant avant de trouver l'abri du Temple et d'être au sec.

- J'vais nous chercher des t-shirt ! fit Aïolia en disparaissant dans le couloir pour revenir quelque secondes plus tard. "Tu manges avec moi ? " ajouta-t-il. Tu vas pas monter chez toi avec le temps qui fait !
- J'veux bien ! Qu'est-ce qu'on mange ?
- Steaks frites, salade, fromages ?
- Génial !

Pendant qu'ils s'affairaient à préparer leur repas, parlant de tout et de rien, Aïoros n'était pas dupe. Il voyait bien que son frère tentait de faire bonne figure et lui se demandait comment il allait faire pour l'amener à se confier. D'ordinaire, il n'avait pas besoin de le forcer pour qu'il lui parle de ses états d'âmes mais là, il savait qu'à la moindre allusion, Aïolia se fermerait comme une huître.

C'est dans une bonne ambiance toute relative qu'ils déjeunèrent, Aïolia faisant toujours des efforts pour cacher sa déprime à son frère qui voyait tout. Il eut une idée.

- Lia, je… j'ai besoin de parler à quelqu'un, fit-il entre deux gorgées de café et baissant les yeux sur sa tasse.
- Quand tu m'appelles comme ça, c'est que t'es pas bien. J't'écoute.
- T'as vu depuis quelques temps, y a pas mal de couple qui se sont formés. Certains, c'est du temporaire, mais d'autres sont beaucoup plus solides.
- Où tu veux en venir ? questionna le Lion sur la défensive, jetant à son frère des regards en coin.
- Ben j'trouve que c'est bien qu'on puisse vivre enfin une vie presque normale. J'aimerais bien que ça m'arrive à moi aussi !

Le gardien du Temple regarda le Sagittaire avec des yeux ronds comme des soucoupes. Son grand frère était en train de lui dire qu'il voudrait avoir lui aussi une aventure.

- T'es sérieux ? Tu crois pas que t'es…
- … un peu jeune ? Alors quand ça t'arrange je suis ton grand frère mais pour être amoureux et vivre une histoire je suis trop jeune ! s'emporta légèrement Aïoros, ravi de voir que son frère réagissait comme il l'avait prévu.
- Non ! C'est pas… si, en fait c'est un peu ça !
- Quel âge t'avais toi la première fois que t'es tombé amoureux ? Et ne me mens pas, je le sais !
- Treize ans.
- Et ta première expérience sexuelle ? Ca aussi je le sais !
- Presque quinze ans.
- Alors, tu vois !
- Mais comment tu sais tout ça ?
- Là où j'étais, je savais tout ce qui se passait au Sanctuaire. Mais tu le sais aussi bien que moi. Peu importe, j'ai besoin moi aussi d'être aimer et pas comme un ami mais comme un amant. Et toi aussi, ça te f'rais du bien.

Aïolia blêmit en entendant la dernière phrase. Pourquoi son frère lui disait-il ça ? Mais, et lui qui voulait avoir un amant ! A son âge ! Et zut ! Il avait raison. S'il avait été assez âgé pour mourir, il l'était aussi pour aimer et être aimé. Et c'était beaucoup moins dangereux… en principe ! Il fixa sont frère de ses prunelles d'un vert lumineux et celui-ci ne cilla pas. Il soutint ce regard avec une véhémence muette qui en aurait déstabilisé plus d'un.

- T'as raison. T'as tout à fait le droit d'être heureux toi aussi et j'ai rien à dire.
- Quoique tu dises de toute manière, c'est pas ton autorisation que j'suis venu demander. J'ai juste besoin de quelqu'un qui m'écoute, c'est tout.
- C'est la moindre des choses. Toi qui est toujours en train de tendre l'oreille pour que les autres viennent se confier, c'est normal que toi aussi tu puisses le faire. Je suis content que ce soit moi.
- Ben t'es mon frère, non ?
- Alors, qu'est-ce que tu veux me dire, je t'écoute.
- En fait je suis amoureux mais comme je suis maintenant le plus jeune des Chevaliers d'Or, c'est à peine si j'existe autrement qu'en tant que tel à ses yeux. Je ne suis qu'Aïoros, Chevalier d'Or du Sagittaire, gardien du neuvième Temple et vaillant défenseur de la Déesse Athéna. Point barre !

Il avait lâché sa phrase avec un tel cynisme que, même surpris parce que ce ton ne ressemblait pas à son frère, Aïolia ne put s'empêcher de sourire. Alors il était amoureux, et de qui ?

- J'te le dis si toi tu me dis pourquoi t'es aussi sombre !

Voilà. Donnant, donnant. Mais c'était sans compter sur la réaction inattendue du Lion. Un éclair de colère passa dans son regard remplacé bien vite par de la tristesse.

- C'est pour ça cette comédie ? fit-il d'un ton désabusé.
- Quelle comédie ?
- Tu fais semblant de te confier en espérant qu'à mon tour je fasse de même.
- Non, pas spécialement. Mais je crois qu'on a besoin de parler tous les deux. Et j'ai pas envie d'aller voir quelqu'un d'autre. Et toi non plus.

Aïolia s'était levé et regardait par la fenêtre de la cuisine, les mains enfoncées dans les poches de son jeans. Dehors, l'orage ne faiblissait pas. La pluie tombait si dense et en telles quantités que la terre desséchée et assoiffée n'arrivait pas à l'absorber. En moins d'une heure, le Grand Escalier s'était transformé en petit torrent et les petits jardins des appartements de chaque Temples, en mare de boue. Le ciel était d'un gris foncé un peu verdâtre et les nuages filaient à une vitesse folle, poussés par les fortes rafales de vent. C'était un peu le même genre de tempête qui faisait rage dans l'esprit du Lion.

- D'accord, fit la voix du Sagittaire dans son dos. Je commence. Je suis amoureux de Saga et ça date pas d'hier.
- Quoi ? sursauta Aïolia en se retournant vivement. Mais… il a donné l'ordre…
- … de me tuer à Shura, oui merci, j'suis au courant ! Mais ce n'était pas lui, Aïolia. Ce n'était pas Saga. Celui qui a donné cet ordre c'était… l'Autre. Quand j'ai rencontré Saga, il était exactement comme aujourd'hui. Je sais que tu as beaucoup d'estime pour le Chevalier qu'il est.
- C'est vrai, je dois bien l'avouer.
- J'ai compris que j'éprouvais autre chose que de l'amitié pour lui quelques semaines avant qu'il disparaisse et Kanon avec lui. La suite tu la connais. Et aujourd'hui, je m'aperçois que mes sentiments n'ont pas changé. Ils sont peut-être même encore plus forts parce que je sais par quoi il est passé, tout ce qu'il a dû faire et à mes yeux, il n'en est que plus magnifique encore. Je sais que ça doit te paraître complètement aberrant que je puisse aimer celui que tu considères comme étant indirectement mon assassin. Mais moi je ne le vois pas comme ça. Je ne lui en ai jamais voulu parce que ça n'était pas lui. Et ça tu dois le comprendre et l'admettre.
- Y a un point que j'aimerais éclaircir avant tout. Quand tu dis que là où tu étais, tu savais tout ce qui se passait au Sanctuaire... Mais t'étais où ?
- A Elysion. Le fait d'avoir sauvé une déesse de la mort, même si elle devait devenir l'adversaire d'Hadès, te lave de tous tes pêchers. Je passais mon temps devant un bassin qui était comme une fenêtre ouverte sur les évènements qui se sont déroulés jusqu'à ce qu'on pulvérise le Mur des Lamentations. C'est aussi de cette façon que j'ai pu manipuler mon armure et la confier à Seiya à plusieurs reprises.
- Et nous, on était où… après ?
- Dans le Cocyte. C'est là que vont ceux qui ont commis le plus grave des pêchers. Combattre les Dieux.

Il fallut plusieurs minutes au Lion pour ingurgiter ce que venait de lui expliquer le Sagittaire. Faut dire que c'est pas tous les jours qu'on entend ça sur le Monde des Ténèbres. Mais pourtant, ça semblait logique. Ce qui l'était moins, c'était les sentiments de son frère, mais ça il pouvait encore l'encaisser.

- Moi c'est pas tout à fait pareil. C'est pas de l'amour que j'éprouve. Ce serait même tout le contraire.
- L'amour et la haine sont les fruits du même arbre comme dit le proverbe, et la frontière entre les deux est parfois bien mince.
- Peut-être, mais je suis sûr de ne pas les confondre.
- Tu peux être plus clair ?
- Malgré ce qu'il a fait de bien, bien qu'il ait reconnu avoir été trompé, à chaque fois que je le vois, j'ai envie de le tuer.
- De qui tu parles ?
- De Shura ! Jamais je lui pardonnerai de t'avoir tué. J'arrive même plus à rester en sa présence. Quand il est là, c'est comme si j'arrivais plus à respirer. J'ai qu'une envie, lui sauter à la gorge et laisser le Lion le déchiqueter avec ses crocs et ses griffes ! Et en même temps…
- Quoi ?
- Non, rien !

Aïoros comprit alors pourquoi son frère s'était refermé sur lui-même le matin à l'entraînement en voyant arriver le Capricorne. Aïolia avait parlé avec tant de rancœur dans la voix, tant de haine que ça le troubla.

- Moi j'lui en veux pas. Je lui ai pardonné et aujourd'hui c'est mon ami. Tu devrais tenir compte des circonstances dans les quelles les choses se sont déroulées. Ne les sort pas de leur contexte, elles n'auraient plus aucune signification.

Le Lion regarda son frère avec une lueur étrange dans le regard. C'est vrai qu'il n'était plus un gamin de quatorze ans, du moins psychologiquement. Il avait une façon très mature d'analyser les choses, très adulte.

- Je peux pas oublier ce qu'il a fait. Il m'a privé de mon grand frère au moment où j'en avais le plus besoin. J'ai grandi en croyant que t'étais un traitre. J'ai été accusé d'être le frère d'un traitre. T'imagine pas comme j'ai eu du mal à ne pas baisser les bras.
- Si, je l'sais. Je voyais tout, n'oublie pas ! Mais t'as pas baissé les bras. Tu es même devenu un Chevalier d'Or, craint et respecté par tous ceux qui t'ont harcelé, maltraité et insulté. C'est une belle revanche non ?
- Mais comment tu fais pour…
- J'ai pardonné Lia, j'ai pardonné tout simplement. Essaie d'en faire autant parce que ta haine vas te pourrir la vie. Tu crois pas qu'on a assez donné ? Que ça suffit maintenant ? Tourne la page, passe à autre chose. Vis enfin cette nouvelle vie sans te retourner constamment sur le passé. Tu n'y verras que la souffrance, la mort, la haine, la rancœur, la tristesse. Oh, cette nouvelle existence ne sera pas exempte de tous ces sentiments, mais ils n'auront aucun lien avec le passé. J'ai pas envie de te voir te détruire à cause de quelque chose qui ne te concerne qu'indirectement.
- Comment ça indirectement ?
- C'est moi qui suis mort ! Tué par Shura, ordonné par Saga, enfin l'Autre. Toi t'es concerné que parce que t'es mon frère. Si ça avait été Camus, ou Shaka ou n'importe quel autre Chevalier sans lien de parenté avec toi, t'aurais pas réagis ainsi.
- C'est normal, tu es mon frère !

Aïolia martelait cet argument comme s'il allait lui permettre de rallier Aïoros à son point de vue. Mais c'était peine perdue. Le Sagittaire ne voyait pas du tout les choses de la même façon que lui et il ne semblait pas prêt à le faire.

- J'avais de l'affection pour Shura, poursuivit le Lion. De l'affection et de l'admiration. Je l'aimais bien. Mais après ce qu'il a fait, ça n'a plus jamais été la même chose…
- Lia ! Arrête ! fit le Sagittaire en posant ses mains sur les épaules d'Aïolia. Arrête ! Ca suffit ! J't'en prie. Je ne peux même pas te remercier d'éprouver autant de haine pour l'homme qui m'a tué parce que je ne t'approuve pas. Tu vas finir complètement fou, tu vas te détruire. Tu dois prendre conscience de ça. Fais-moi confiance, pardonne-lui. Regarde ce qu'il a accompli, ce qu'il a risqué en se faisant passer pour un Spectre et en acceptant d'utiliser l'Athéna Exclamation. Même en m'ayant tué, il aurait conservé son honneur de Chevalier, mais ce qu'il a fait en tant que Spectre d'Hadès, si la mission avait échoué, il aurait tout perdu. Il aurait été considéré comme un paria, son nom traîné dans la boue et banni de l'ordre de la Chevalerie d'Athéna. Aïolia, ce qu'il a accompli et ce qu'il a risqué rachète, à mes yeux, ce qu'il m'a fait, ignorant qu'il était manipulé.

Pendant les jours qui suivirent cette explication de texte entre les deux frères, Aïoros avait tout simplement commencé à essayer de séduire Saga. Il se montrait attentif, l'invita à deux reprises à déjeuner avec lui après l'entraînement, discutait volontiers des histoires d'amour entre les uns et les autres, montrant ainsi que ça ne le choquait pas "malgré son âge", argument qu'il mettait assez souvent en avant, et même qu'il était très content pour eux.

Un soir, alors qu'il avait invité le Gémeaux à dîner pour la première fois et voyant arriver la fin du repas, et donc le moment où Saga allait regagner son Temple, il lui proposa une partie d'échec que ce dernier accepta avec un plaisir non dissimulé.

Après le tirage au sort, Saga commença la partie, il jouait avec les blancs. Il doutait un peu du niveau de son adversaire mais revint vite à de plus modestes sentiments lorsqu'il perdit, deux pions, un fou et un cavalier en quatre coups. Aïoros ne lui faisait aucun cadeau. Etait-ce ça façon à lui de se venger ? L'humilier aux échecs ? Il eut un sourire mental et regarda le Sagittaire assis sur le fauteuil de l'autre coté de la table basse du salon. Il se souvenait d'un gamin d'un an de moins que lui et Kanon. Un garçon droit, loyal, dévoué, gentil, honnête. Il avait encore beaucoup d'autres qualificatifs du même genre, mais s'arrêta là. Et il retrouvait le même homme. Oh bien sûr, il avait changé, comme eux tous. Il arrivait à faire oublier son âge par sa grande maturité d'esprit. En pensant pourquoi il était encore si jeune, Saga eut un pincement au cœur et refoula rapidement les larmes qu'il sentait lui monter aux yeux.

Il joua et pris un fou au Sagittaire qui leva les sourcils et fit la grimace. Ce coup-là, il ne l'avait pas vu venir. Il se perdit dans la contemplation de l'échiquier sans s'apercevoir qu'Aïoros l'observait. Non, il ne l'observait pas, il le dévorait des yeux. Au bout d'un long moment il leva le regard et croisa celui de son hôte. Il y lut une étrange expression, mais si furtive qu'il ne put la comprendre.

- J'ai un bouton sur le nez ? fit-il sur le ton de la plaisanterie.
- Non ! Je me souvenais de toi quand tu as eu ton armure. J'te trouvais déjà séduisant, mais avec elle tu étais encore plus… charismatique.

Si Saga fut surpris par ces paroles il n'en montra rien et baissa à nouveau les yeux sur l'échiquier.

- Tu n'as pas joué ?
- J'ai envie de jouer à un autre jeu.

Aïoros se leva, contourna la table et vint s'asseoir à cheval sur les cuisses de Saga. Celui-ci sursauta et se rejeta en arrière dans le canapé.

- Aïoros, qu'est-ce tu fais ? souffla-t-il en regardant le Sagittaire droit dans les yeux.
- Tu veux que j'te fasse un dessin peut-être ?

Tout en parlant, il avait posé ses mains de chaque coté de la tête du Gémeaux sur le dossier du canapé et avait approché son visage à quelques centimètres du sien, son regard planté comme un poignard dans celui de Saga.

- Arrêtes ça !
- Pourquoi ?

Il posa ses lèvres sur celles un peu tremblantes de l'ancien Grand Pope. Son baiser était doux. Il joua un moment avec la bouche de son invité puis sa langue caressa ses lèvres, les invitant à s'ouvrir. Mais encore Saga se détourna.

- Aïoros mais à quoi tu joues ?
- Je joue pas ! fit-il un peu plus brusquement qu'il ne l'aurait voulu. T'as pas encore compris ? Je t'aime Saga. Je t'aimais déjà avant que tu n'obtiennes ton armure et malgré tout c'qui c'est passé, mes sentiments n'ont pas changé. Et je sais que je ne te suis pas indifférent !

- Descend de mes genoux !
- Non ! Ils sont très confortables !
- C'est pas bien c'que tu fais !
- Où est le mal ?

Et là, il embrassa Saga à pleine bouche. Sa langue se fraya un chemin jusqu'à celle du Gémeaux et s'enroula autour d'elle si sensuellement qu'il lui arracha un gémissement de plaisir. Il répondit à son tour à se baiser qui allumait un brasier dans son corps. Mais une fois encore, il se détourna.

- Je peux pas faire ça, Aïoros !
- Pourquoi ?

Le Sagittaire avait glissé ses lèvres dans son cou et léchait la peau tiède et douce. Saga le prit par les épaules et le regarda bien en face.

- Parce que tu n'as que quatorze ans ! cria-t-il.

Un sourire malsain étira les lèvres d'Aïoros. Il se leva et s'éloigna de deux pas sans lâcher Saga des yeux.

- T'as des scrupules à te laisser séduire par un gamin, c'est ça ?
- Oui, je l'avoue.
- Où étaient tes scrupules quand tu as essayé de me tuer, puis quand tu as demandé à Shura de me traquer et de m'éliminer ?
- Tu sais très bien que…
- Ce que je sais c'est qu'à l'époque j'étais assez âgé pour mourir mais qu'aujourd'hui je suis trop jeune pour aimer et être aimé ? Pour t'aimer…toi…, termina-t-il dans un souffle.
- Ros tu confonds tout ! Tu…
- Ros ? Y a que toi qui m'appelais comme ça. Et je ne confonds pas tout. C'est quoi en réalité qui t'gêne ? Le fait que j'ai quatorze ans physiquement, parce que psychologiquement, y a longtemps que j'les ai plus, ou bien que je puisse être amoureux comme un fou de mon assassin ? Hein ? Alors, c'est quoi qui te gêne ?

Ils s'affrontèrent un instant du regard. Les yeux de Saga reflétaient une certaine tristesse alors que ceux d'Aïoros flamboyaient de frustration et d'amour.

- Quand tu auras trouvé la réponse à cette question, fit le Sagittaire en se détournant, et que tu auras mis tes inutiles scrupules à la poubelle, reviens me voir. On aura alors peut-être une chance d'être heureux nous aussi. J'te raccompagne pas, tu connais l'chemin.

Il y avait tant d'amertume dans sa voix que Saga en fut profondément attristé. Il se leva, prit son sweat-shirt et se dirigea vers la sortie de l'appartement.

- Ma porte te sera toujours ouverte… toujours.

Saga descendait les marches en direction de son Temple, l'esprit en proie à la confusion la plus totale. Ce qui venait de se passer ne pouvait pas rester sans conséquence. Qu'est-ce qui le gênait vraiment ? Son âge ou qu'il aime son meurtrier ? Mais il y avait autre chose qui lui trottait dans la tête. Quels étaient ses sentiments à lui envers Aïoros ? Il dut se rendre à l'évidence et être honnête avec lui-même. Il aimait le Sagittaire et depuis aussi longtemps. Avant qu'il n'usurpe la place de Grand Pope. Mais à l'époque, ils avaient le même âge, même pas deux ans d'écart. Et aujourd'hui, il en avait le double. Physiquement. Parce que le Sagittaire c'était bien souvent montré plus mature que certains Chevaliers soit disant adultes. "…assez âgé pour mourir mais trop jeune pour aimer et être aimé…" C'était tellement vrai. Tellement vrai !

Il avait eu si mal lorsqu'il avait appris que Shura avait rempli sa mission, même si on n'avait pas retrouvé le corps d'Aïoros. Spectateur impuissant de ce que son corps faisait sous l'emprise de l'Autre qu'il n'arrivait plus à combattre sauf quand il voulait s'en prendre à Kanon. Il aimait ce Chevalier qui le premier avait démontré son dévouement et son abnégation envers Athéna. Il aimait ce Chevalier qui, par delà la mort, avait prêté son armure à Seiya pour qu'il puisse défendre la Déesse à son tour. Il aimait ce Chevalier dont l'armure fut la première à rejoindre les autres Chevaliers d'Or vivants devant le Mur des Lamentations. Il l'aimait tout simplement. Il l'avait toujours aimé.

Il s'arrêta entre le Temple de la Vierge et celui du Lion, l'esprit et le cœur submergés par ses émotions. Que devait-il faire ? Vivre son amour et risquer l'opprobre de ses amis pour avoir oser toucher à un mineur ? Y renoncer et devenir fou ? Vivre son amour sans se soucier de l'opinion des autres ? Tant pis, ils s'en iraient s'il le faut. Ils quitteraient le Sanctuaire. Saga fit demi-tour et remonta l'escalier en courant aussi vite qu'il le put.

Il arriva légèrement essoufflé devant le neuvième Temple et détecta le cosmos d'Aïoros pas vraiment paisible ni calme et il savait qu'il avait senti le sien. Il entra dans l'appartement et gagna le salon. Le Sagittaire assit dans le canapé se leva et resta debout à coté de la table basse. Ils se dévisagèrent un long moment.

- Tu as trouvé la réponse à cette question ? lui demanda le maître des lieux d'un ton parfaitement neutre et contrôlé.
- Oui, répondit-il en s'approchant.
- Je serais curieux de la connaître.

 

A suivre…

Chapitre 2

 

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